Les lieux où sont enfouies nos racines

Publié le 10 janvier 2025 par Goût, Saveur et Tradition

Les lieux où sont enfouies nos racines

Dans les années 1960, le rituel des grandes vacances à la ferme était accueilli avec une certaine appréhension. La vie à la campagne où nous allions rester chez nos grands-parents, avec mon frère, nous séparait de Paris et de nos habitudes pendant deux longs mois.

En premier lieu, c’était déjà « LA » grande aventure pour atteindre notre destination en Auvergne. Après une bonne journée de voiture, les derniers kilomètres sur des routes étroites et tout juste carrossables nous paraissaient interminables. Et puis au détour du chemin, juste avant de traverser le pont du Sauze, cerné d’un côté par le bois de sapin et de l’autre par les pâturages, les premières fermes apparaissaient. Encore quelques centaines de mètres et nous arrivions enfin au milieu du petit village, où la mémé et le pépé nous attendaient sur le pas de porte de la grande bâtisse qui allait nous abriter tout l’été.

Années après années, nous avons pris nos marques et ces séjours à la campagne rythmés par les fenaisons et les moissons, nous ont permis d’agrandir notre terrain de jeux à ciel ouvert. En se familiarisant avec les sentiers où nous pouvions vadrouiller, toutes les granges où l’on se cachait et tous les méandres de la rivière où l’on pataugeait pieds nus, essayant de prendre une truite, un goujon ou une écrevisse. Ce n’était qu’insouciance et bonheur pour les enfants que nous étions !

Au « communal », on courait derrière les vaches où le grand-père les « menait » paître, en fin d’après-midi, au son des cloches, elles regagnaient l’étable pour la traite. Je me souviens d’être allé chercher les œufs « frais » au poulailler, de m’être érafler les genoux sur l’échelle en montant pas très rassuré au grenier, pour récupérer les « chevretons » qui séchaient dans le garde-manger grillagé à l’abri des mouches.

Le samedi, c’était la fête, pendant que le pépé sortait la Peugeot 202 du garage avec toute l’attention nécessaire, la mémé nous habillait « tout de propre ». On prenait la direction de la grande ville distante d’une dizaine de kilomètres où le marché hebdomadaire, lieu de retrouvaille de tous les villages avoisinants, marquait la vie des paysans. En avançant au milieu des étals, des forains et des camelots, on aurait pu penser que l’Auvergnat était la langue nationale.

Avec le recul, 65 ans plus tard, je peux dire que nous avons eu la chance de vivre ces moments formidables avec des aventures bien différentes de ceux qui restaient à la capitale pendant leurs grandes vacances. C’est certainement dans ces moments-là, au beau milieu des gens de la terre et de leur savoir-faire… que j’ai découvert mon attachement pour les valeurs simples et traditionnelles.

Gérard
Cheyrac, 40km au Nord du Puy-en-Velay