Tuer le cochon dans le Haut-Velay

Publié le 24 janvier 2025 par Goût, Saveur et Tradition

Tuer le cochon dans le Haut-Velay

De façon immuable, l’hiver voit revenir le temps pour « tuer le cochon ».

Depuis l’Antiquité, cette coutume coïncide avec les mois les plus froids. Cette routine populaire permettait de nourrir en viande et charcuterie la famille pendant de longs mois. Dans la haute Auvergne cette pratique avait également un côté festif, l’occasion de se retrouver entre amis.

Au début du siècle dernier, l’arrêté préfectoral du 1er Décembre 1905 interdisait les tuer les « bêtes » dans les rues des communes qui possédaient un abattoir public. Jusqu’à ce qu’un article du code rural autorise de « tuer le cochon » pour sa consommation personnelle.

On allait « aux tripes »

On  revêtait « son bel habit du dimanche », on  allait « aux tripes » comme on disait. La maîtresse de maison sortait la « vaisselle » et installait une « belle table ».

A Cheyrac, dans le Haut-Velay,  à la ferme de Jean et Marie MONEYRON, je me souviens des jours ou mon grand-père et mon oncle aménageaient la cour tôt le matin, le fétu de paille était préparé, le banc, le crochet, les bassines d’eau chaude, les couteaux et les affiloirs disposés à proximité. Tout était fin prêt, la tue-cochon ou tuaille du cochon pouvait commencer.

La « bête » avait été choisi dès le début de l’hiver et soigneusement engraissé, avec plein de bonnes choses. La première épreuve consistait à l’amener vers le banc. Il fallait la tirer par les oreilles, un voisin la tenait par la queue et un autre la poussait tant bien que mal vers le milieu de la cour. Hurlant à pleins poumons… le cotsou comprenait qu’il allait passer un mauvais moment.

Dans le cochon tout est bon

Dès que le « saigneur » avait enfoncé le coutelas dans la gorge pour sectionner la carotide Le sang coulait abondement, il était récolté dans une bassine par « les femmes » pour la confection du boudin.

Ensuite d’un coup de couteau très précis, celui qui faisait office de charcutier, dégageait les tendons des pattes arrière, pour y enfiler des manchons de bois afin de pouvoir suspendre l’animal à l’échelle.

On le passait au feu pour brûler les poils. Enormément d’eau pour l’ébouillanter et le laver en frottant avec une brosse dure et on le grattait avec un couteau.

Après ce nettoyage, venait le travail des « gros bras » . Le cotsou était vidé de ses tripes, cœur, poumons… coupé en deux et enfin la viande était soigneusement découpée pour faire les charcuteries. Il était découpé en morceaux, sauf les jambons qu’on laissait entier.

Tout était récupéré, les tripes étaient soigneusement « chavées » à l’aide d’un petit « pêleu » en prenant bien soins de ne pas les trouer.

Les abats étaient cuits à l’eau salée et la « Mémé Marie » pouvait enfin préparer ses merveilleux boudins, ses saucisses d’herbes, ses pâtés et cuisiner la tête. Plus tard, la ventrèche et le lard étaient déposés au saloir.

Enfin les cuisses à jambons étaient frictionnées avec un peu de vinaigre avant de les recouvrir de gros sel et mis à affiner. Après un bon mois ils étaient pendus dans la cheminée pour y être fumés !

Un moment attendu et apprécié. Le boudin frais en était un. « Savourer un boudin du jour avec des pommes à la poêle c’est quand même quelque de particulier, avec un goût spécifique ».

Voilà comment on tuait le cochon en famille du coté de Cheyrac dans les années soixante.